Tous les radars de Moderna s’affolent. Alors que la situation géopolitique du continent venait d’aboutir à un équilibre tout relatif, un événement hors du commun et imprévisible menace de chambouler les rapports de force : un continent tout entier apparaît en pleine mer, à des centaines de kilomètres des premières côtes de Moderna. Toutes les nations puissantes font cette découverte presque simultanément, grâce à leurs radars derniers cris et à leurs satellites orbitaires.

Une nouvelle information tombe, encore plus préoccupante que la première : l’apparition soudaine et inattendue de ce continent s’est accompagnée de celle d’un épais nuage de poussière et de roches pourpres qui foncent en direction de Moderna à une vitesse ahurissante, et risquent d’englober le continent tout entier d’ici une poignée d’heures. Les différents gouvernements négocient et décident finalement de dissimuler l'information, afin d’éviter une potentielle cohue qui pourrait complexifier grandement la gestion de cette éventuelle crise.

Le nuage pourfend Moderna de part en part en plein jour, et finit par se déposer sur ses terres, paresseusement. De nombreux citoyens du continent entier y sont exposés bien malgré eux en tâchant de se mettre à l’abri dans la panique, occasionnant des quintes de toux. Finalement, le calme revient : plus de peur que de mal. Les gouvernements estiment que la décision prise a été la bonne, et la nouvelle de l’apparition d’un nouveau continent commence à filtrer dans les médias.

Plusieurs témoignages, notamment vidéos, commencent à être relayés sur internet. Ceux-ci sont unanimes : parmi les individus qui ont été exposés au nuage de poussière, de nombreux ont commencé à développer des facultés extraordinaires… des super-pouvoirs.

Face à l’accumulation de preuves évidentes, la Francie, la Britannia et l’Iberia décident de fonder l’OIH, l’Organisation Internationale des Héros, officiellement supranationale et ayant pour objectif de gérer ces apparitions de super-pouvoirs, de les classifier et de les encadrer.

L’armée navale de la Francie, la première, arrive sur les côtes du continent qui sera nommé Antiqua, en opposition à Moderna, et commence à en fouler le sol. Elle y est rejointe par les armées des autres pays, le Reykjav et Singapura mis-à-part. Dans le même temps, sur Moderna, les super-héros commencent à se multiplier et à faire usage de leurs pouvoirs à des fins diverses : tantôt pour instaurer l’ordre, tantôt pour le défier égoïstement.

La nouvelle est cinglante : les opérations militaires franciennes ont échoué, et la plupart des militaires qui y ont été envoyés ont subi un terrible sort. Les rapports d’autres pays finissent par tomber dans la foulée, et le constat est sans appel. Antiqua abrite de la vie, animale et humaine : et toute cette vie abonde de pouvoirs extraordinaires, similaires à ceux qui ont commencé à éclore sur Moderna. Pour les gouvernements, la situation est claire : ce nuage de poussière, Antiqua et les pouvoirs font partie d’un tout indivisible.

Deux mois se sont écoulés, sans changements majeurs dans le paradigme mondial. Les héros commencent à se répandre comme une traînée de poudre, et les armées des pays de Moderna commencent à les démarcher. L’objectif est simple et assumé : tenter de nouvelles expéditions sur Antiqua en comptant sur l’aide de ces surhommes pour sécuriser les convois militaires. Les plus grandes puissances continentales se mettent en branle, et de nouvelles opérations de grande envergure sont annoncées dans la foulée.

Ces nouvelles opérations sont autant de fiascos sanglants que l’Humanité ajoute au sinistre tableau des pertes ayant été occasionnées à la suite de l’apparition d’Antiqua. Face à l’évidence, tous les pays changent leurs fusils d’épaules et chargent l’OIH, fraîchement créée, de réfléchir à cet épineux problème. Les moyens de l’Organisation augmentent drastiquement.

Bêtes comme bonsoir, les premières recommandations de l’OIH tombent : il faut créer des Académies Héroïques et y former l’élite de demain, laquelle permettra à Moderna de mettre un pied serein sur Antiqua. Ni une, ni deux, la totalité des pays de Moderna décident de jouer le jeu. Au cours des semaines qui suivent, les neuf Académies voient le jour, notamment encadrées par les héros et les militaires ayant survécu aux premières expéditions sur Antiqua.

Les premières Académies ouvrent leurs portes et accueillent leurs premières vagues d’étudiants, tous débordant d’ambition. Leurs professeurs, rendus pour la plupart cyniques par la terrible expérience qui a été la leur sur Antiqua, se chargent de les rappeler à l’ordre et de leur signifier que rien de tout cela n’est un jeu. L’ère des héros aventuriers démarre.

Une île positionnée à l’ouest d’Antiqua est officiellement octroyée à l’OIH, qui la baptise Terrafirma. L’idée est d’en faire une île neutre de toute influence politique provenant de Moderna, de manière à ce que chaque pays puisse y établir une base militaire, un havre de paix bienvenu à quelques encablures de l’enfer d’Antiqua.

Les rapports géopolitiques autour de l’épineuse question d’Antiqua se sont progressivement tendus, malgré les efforts de l’OIH pour pousser les nations à œuvrer fraternellement. Les dernières découvertes sont implacables : le nuage de poussière qui s’est abattu sur Moderna suite à l’apparition d’Antiqua en pleine mer est effectivement responsable de l’éveil de ces étranges pouvoirs, aussi bien chez les hommes que chez les animaux qui ont pu l’inhaler, à hauteur d’environ le tiers d’entre eux. Cette matière, baptisée le Naraka catana par les habitants d’Antiqua, devient une ressource stratégique de premier ordre. Le problème, c’est que les indigènes d’Antiqua comptent eux aussi sur cette matière… Dans ce monde où la moindre expédition peut bouleverser les rapports de force entre nations, les héros qui prennent part à ces périlleuses aventures ne sont pas de simples soldats : ils sont pour la plupart d’entre eux des exemples de courage et de dévotion, érigés comme des légendes de leurs pays respectifs.

Les premiers échanges entre gouvernements de Moderna et d’Antiqua n’ont pas été très enthousiasmants, à mi-chemin entre confrontation et froide tolérance : tous décident de se traiter avec méfiance, les habitants d’Antiqua n’ayant pas conscience d’être apparus de nulle part. En l’absence d’un calendrier local partagé par la totalité des indigènes, l’OIH décide d’imposer le calendrier de Moderna sur Antiqua.