La salle était pleine à craquer, les chuchotements prenaient de l’ampleur sans jamais parvenir à être de franches discussions, comme si l’ambiance était bien trop sérieuse et ne se prêtait aucunement à une cacophonie sans règles. Les chaises, alignées par rangées, ne laissant qu’un long chemin jusqu’à une estrade encadrée par de longs et épais rideaux en velours pourpres, étaient toutes prises. Dans une salle attenante s’affairaient déjà des serveurs, fignolant les derniers préparatifs pour le buffet qui suivrait cet événement.

On avait fait venir des journalistes, triés sur le volet, des diplomates, des ambassadeurs, arrivés tout droit de Francie, exceptionnellement. On avait invité le gratin militaire et héroïque disponible sur Terrafirma, on avait fait venir l’un de leurs représentants à l’OIH. On avait réuni un parterre de gens de son pays natal rien que pour lui, pour son couronnement. Car c’était bien ce que toute cette rigueur et ces politesses aussi cérémonieuses qu’obséquieuses laissaient entendre : il rejoignait le cercle très privé de leurs poules aux oeufs d’or, celles qui faisaient la plus grande fierté de leur nation.

Ironiquement, de ses compatriotes qui avaient choisi de mettre leurs pouvoirs au service de leur pays, il y en avait bien peu, de ce qu’il pouvait en apercevoir en laissant son regard se balader sur les têtes tournées dans la direction de l’estrade. Bien peu de ceux qu’il connaissait, en tout cas. Une moitié n’en avait peut-être rien à faire, l’autre devait se trouver sur Antiqua à explorer ce continent qu’ils avaient tous maudit au moins une fois.

La luminosité des lampes de cette si grande pièce qui les accueillait baissa. Les murmures cessèrent et le silence tomba presque religieusement alors qu’il patientait, camouflé derrière l’un des lourds rideaux. Un homme passa près de lui, s’avança sur la scène jusqu’au pupitre de conférence qui s’y trouvait, ajusta le micro à sa hauteur, toisa une poignée de secondes la salle dont il ne distinguait plus les occupants, avant de commencer une déclaration rodée.



Il fit une pause, se tourna vers l’un des côtés des semblants de coulisses, fit un signe de la main à celui qui se trouvait tapi derrière afin qu’il vienne le rejoindre. Alors, il entra enfin en scène, sans aucun regard pour tous ceux qui étaient venus l’admirer.



Ses longs cheveux argentés réunis en une queue de cheval haute, ses yeux verts rivés sur celui qui avait requis sa présence, ses nombreuses cicatrices éparpillées ça et là sur la peau visible de son visage et de ses mains, il était vêtu de vêtements sombres et sobres. Un costume de héros expéditionnaire des plus simples et des plus normaux. Discret, comme celui qui le portait, mais dont la présence, fine et élégante, ne manquait pas de charisme.



Un discours indubitablement pompeux, qui gonflait l’ego de celui à qui il était destiné, bien sûr, et celui, moins impliqué, de tous ceux qui étaient venus assister à la remise de cette distinction. Le héros baissa la tête, le temps qu’on lui passe le ruban autour du cou et que la décoration, taillée dans ce minerai des plus précieux et si étincelant, qui pendait lourdement au bout, ne vienne se loger contre son torse, sous les applaudissements, sous les crépitements et la lumière des flashs des appareils photo.

Il était le quatrième. Le quatrième héros de diamant de la Francie.